lundi 27 octobre 2008

SYRIE • Les raisons de l'attaque américaine en territoire syrien


Le 26 octobre, un hélicoptère américain lançait un raid à la frontière syro-irakienne. Il visait officiellement un chef proche d'Al-Qaida. Mais Washington montrait aussi qu'elle considère toujours la Syrie comme un pays de l'"axe du mal", analyse le quotidien Ha'Aretz.
Ceux qui s'attendaient à un bombardement de l'Iran par les Etats-Unis à la veille de l'élection présidentielle, ou immédiatement après, devront se contenter d'une frappe moins importante : une attaque par hélicoptère, dans la nuit de dimanche [26 octobre], au nord-est de la Syrie.
La principale cible de cette attaque, selon les premières informations, était un membre haut placé du "djihad mondial" – réseau lié à Al-Qaida.

Du point de vue des Etats-Unis, le contexte est principalement irakien. Il s'agit d'une frappe contre ceux qui leur causent des problèmes dans leur "arrière-cour". Elle a pour but d'assurer la stabilité en Irak. Mais il y a aussi des conséquences pour Israël. Le fait que Bachar El-Assad a été prêt à renouer des relations diplomatiques avec Israël il y a un an, avec l'aide de médiateurs turcs, s'explique dans une large mesure par l'espoir de Damas de se rapprocher de Washington.

Cela ne s'est pas réellement produit – Assad en a néanmoins tiré un dividende immédiat. Ce dernier a redoré son blason dans le monde arabe, tout en améliorant ses relations avec l'Europe.

Même si le président Bush ne s'est pas opposé aux négociations entre Israël et la Syrie, son gouvernement est resté très sceptique à l'égard du régime de Damas et a continué à percevoir la Syrie comme un pays de l'"axe du mal". Les Américains ont par ailleurs refusé de mener toute action concrète qui aurait permis aux Syriens de progresser dans leurs négociations. Désormais, il est clair que les Etats-Unis n'hésiteront pas à attaquer des cibles terroristes sur le territoire syrien.

A cet égard, les Américains ne font pas cavalier seul. Israël les a déjà précédés avec l'attaque de la centrale nucléaire de Deir Al-Zour, en septembre 2007. Sans parler d'une série de mystérieux accidents sur le territoire syrien, depuis l'assassinat d'Imad Mughniyeh [leader du Hezbollah assassiné à Damas] en février dernier jusqu'à celui du général Mohammed Suleiman [conseiller pour la sécurité du président Assad, il a été assassiné à Tartous, ville côtière au nord de la Syrie] il y a environ deux mois. Le dénominateur commun de toutes ces opérations est que plus personne ne prend la Syrie au sérieux, étant donné les violations répétées de sa souveraineté. Le pays n'a sans doute jamais connu une telle instabilité.

Cette situation en Syrie vient s'ajouter aux tensions entre Israël et le Liban. Amos Yadlin, le chef du renseignement militaire israélien, a récemment déclaré que la contrebande d'armes depuis la Syrie à destination du Hezbollah se poursuivait. Et le ministre de la Défense, Ehoud Barak, a annoncé qu'Israël était prêt à attaquer les convois d'armes, dans un contexte où le Hezbollah tente de s'équiper de missiles antiaériens.

Avant l'attaque, les Etats-Unis avaient lancé une mise en garde. La semaine dernière, lors d'une conférence de presse, un commandant américain basé dans l'ouest de l'Irak a déclaré que la situation s'aggravait à la frontière syrienne. Dans le même temps, l'Arabie Saoudite et la Jordanie fermaient leurs frontières avec l'Irak à la demande des Américains.

Ce modus operandi n'est pas sans évoquer les "assassinats ciblés" d'Israël. Les Américains ont en effet combiné efficacement le travail de renseignement et les actions sur le terrain, menant des frappes aériennes accompagnées par un raid de commando pour confirmer le succès de l'opération.

Amos Harel
Ha'Aretz

http://www.courrierinternational.com/article.asp?obj_id=90851

ÉLECTION AMÉRICAINE • L'ONU vote Obama


The Washington Post s'est rendu au siège des Nations unies, à New York, pour y sonder le personnel international. Le mépris affiché par l'administration Bush pour l'organisation y a laissé des traces.
Au siège des Nations unies, on ne voit ni badges ni banderoles ni tee-shirts portant le slogan "Obama 2008", mais il serait difficile de trouver une parcelle de territoire américain plus enthousiaste à l'idée de voir le sénateur de l'Illinois entrer à la Maison-Blanche.

Un sondage impromptu réalisé auprès d'une trentaine de membres du personnel et de délégués étrangers à l'ONU montre que la grande majorité préférerait voir Obama devenir président. A les en croire, une nouvelle ère de multilatéralisme s'ouvrirait avec le démocrate, après une époque marquée par le mépris des républicains pour l'organisation internationale.

Les partisans d'Obama viennent de Russie, du Canada, de France, de Grande-Bretagne, des Pays-Bas, de la Sierra Leone, d'Afrique du Sud, d'Indonésie et d'ailleurs. "Je crois que vous peinerez à trouver quelqu'un à l'ONU qui ne pense pas qu'Obama serait un formidable progrès par rapport à tout autre choix", explique William H. Luers, directeur exécutif de l'Association américaine pour les Nations unies [qui promeut l'ONU auprès du public américain]. "Les huit dernières années ont été rudes, elles ont suscité beaucoup de ressentiment."

Les conservateurs, que les Nations unies laissent sceptiques, disent ne pas être surpris par cette orientation politique. "Le fait est que la plupart des conservateurs, la plupart des républicains ne vouent pas un culte à l'ONU, et je crois que cela les handicape plus que tout", remarque John Bolton, ancien ambassadeur américain à l'ONU.

Les candidats n'ont pas révélé grand-chose de leurs intentions vis-à-vis des Nations unies, mais Obama a mis l'accent sur sa volonté d'avoir plus franchement recours à la diplomatie que le gouvernement Bush. McCain, lui, a appelé à la création d'une ligue des démocraties. Beaucoup ici redoutent qu'il ne s'agisse d'une façon masquée de mettre l'organisation sur la touche. Le Secrétaire général des Nations unies, Ban Ki-moon, s'est abstenu d'exprimer publiquement une préférence, mais il aurait laissé entendre en privé qu'il avait un faible pour Obama, assurent des responsables de l'ONU.

Parmi les sans-grade, on prend moins de précautions. Beaucoup voient dans les origines multiculturelles d'Obama – un père kenyan, un beau-père indonésien et une mère et des grands-parents du Kansas – un reflet d'eux-mêmes. "Nous ne le considérons pas comme un Africain-Américain", affirme Atoki Ileka, ambassadeur de la RDC. "Pour nous, il est africain."

Cet été, un responsable de l'ONU a organisé une soirée et demandé à ses invités de placer un autocollant représentant un éléphant ou un âne [respectivement l'emblème des républicains et des démocrates] à la porte d'entrée afin d'afficher leur préférence politique. A la fin de la soirée, la porte était couverte de trente ânes et de deux éléphants. "Nous nous sommes aperçus qu'un des républicains était américain et que l'autre ne pouvait pas voter", raconte un témoin. "Nous avons donc convaincu l'Américain de voter pour Obama."

La petite minorité qui soutient McCain à l'ONU – deux seulement des 28 représentants et diplomates interrogés ont dit pencher en faveur du sénateur de l'Arizona – se sent parfois bien seule à Turtle Bay [où se trouve le siège de l'ONU à New York]. "Moi, je me tais", reconnaît un Américain qui prévoit de voter McCain. Comme tous les autres membres du personnel du Secrétariat général, il nous a parlé sous couvert d'anonymat. Il se souvient que les démocrates n'ont pas toujours été d'aussi fervents partisans des Nations unies, et cite en exemple la campagne solitaire menée en 1996 par le gouvernement Clinton pour empêcher la réélection du Secrétaire général de l'époque, Boutros Boutros-Ghali.

Quoi qu'il en soit, la candidature d'Obama a un impact émotionnel énorme parmi les délégués des pays en développement, en particulier pour ce qu'elle révèle de la question raciale aux Etats-Unis. Ils n'ont pas oublié que l'un des plus célèbres fonctionnaires de l'organisation, Ralph Bunche [1903-1971], Africain-Américain qui a reçu le prix Nobel de la Paix [en 1950] pour son travail de médiation au Moyen-Orient, n'aurait jamais pu accéder à de si hautes fonctions dans les cercles s'occupant de la politique étrangère américaine. Quant à Kofi Annan, le premier Secrétaire général noir, il estime qu'une présidence d'Obama serait "phénoménale".

Colum Lynch
The Washington Post

http://www.courrierinternational.com/article.asp?obj_id=90856

Les albinos victimes de crimes rituels en Tanzanie: une fillette tuée


Nouveau meurtre d'albinos en Tanzanie Une fillette albinos a été tuée dimanche en Tanzanie où les personnes atteintes d'albinisme sont victimes d'une recrudescence de crimes rituels, des sorciers leur attribuant des pouvoirs magiques.
La victime, âgée d'environ 10 ans, a été tuée dimanche soir dans son village de Shilela (ouest), a rapporté un élu local Joseph Manyara précisant que ses meurtriers avaient emporté un de ses bras.

Cet assassinat est intervenu quelques heures après un nouvel appel du président tanzanien Jakaya Kikwete à intensifier la répression contre ces meurtres.

Le 2 avril, M. Kikwete avait déjà annoncé une série de mesures destinées à protéger les albinos des attaques perpétrées ou commanditées par des sorciers qui utilisent des parties de leur corps pour attirer la chance.

Dans le cadre de ces mesures, la police avait été appelée à redoubler d'efforts pour retrouver les sorciers soupçonnés de ces crimes tandis que les albinos avaient reçu l'instruction de s'enregistrer auprès des autorités afin qu'elles puissent assurer leur sécurité.

Selon l'association tanzanienne des albinos, au moins 26 d'entre eux ont été tués dans le pays depuis le début de l'année. Cette vague de criminalité touche également le Burundi voisin où deux albinos ont été récemment tués par des trafiquants qui font commerce de leurs organes en Tanzanie.

Les autorités de la province de Ruyigi, frontalière de la Tanzanie, ont décidé de regrouper les 45 albinos recensés dans la province pour assurer leur protection. L'albinisme est une absence totale de pigmentation dans la peau, le système pileux et l'iris des yeux due à des facteurs génétiques.

Monde - International

jeudi 23 octobre 2008

Zone franc : 1 FCFA = 0,00154 euro ? Macroéconomie du masochisme


Certains États abusent de la malchance au point de banaliser la notion de crise économique. C’est certainement le cas des quatorze pays africains qui, avec les Comores et la France, constituent depuis 1939 une étrange union monétaire connue sous le nom de zone franc.

Relique d’un passé colonial qui semble n’avoir jamais eu de fin, cette union reflète à la fois le mimétisme intellectuel des élites africaines qui ne se sont jamais libérées de la mémoire de l’oppression, et l’égoïsme cupide des membres des réseaux de la Françafrique qui continuent de dominer la classe politique et l’administration de la Coopération à Paris.

Alors que le sancienspays africains du Maghreb (Maroc, Algérie, Tunisie) qui étaient, eux aussi,

membres de la zone franc pendant la période coloniale s’étaient réappropriés leur souveraineté monétaire avec l’indépendance, les pays d’Afrique subsaharienne avaient reconduit la logique du pacte colonial, signant avec la France des accords de coopération qui les plaçaient sous la tutelle monétaire de Paris. Et ceci au nom d’une “intégration africaine” qui ne s’est jamais matérialisée. Près d’un demi-siècle après les indépendances que le général de Gaulle leur avait généreusement attribuées, ces pays aux économies fort différentes les unes des autres et ne commerçant pratiquement pas entre eux, continuent d’utiliser la même monnaie qu’à l’époque coloniale (le franc CFA).

Celle-ci est liée à un taux de change fixe avec l’euro et gérée en réalité par une poignée de fonctionnaires de la Banque centrale européenne à Francfort, sans aucun souci ni considération pour la réalité et les besoins réels de ces pays, qui sont aussi parmi les plus pauvres de la planète.

Au moment où l’économie mondiale montre des signes d’essoufflement, que la crise des systèmes financiers et des bourses internationales menace de provoquer une baisse de la croissance dans les pays en développement, il est difficile de comprendre que l’Afrique noire francophone, qui ne peut compter que sur ses exportations pour se développer, continue de s’accommoder d’arrangements monétaires qui la privent de toute marge de manœuvre en matière de compétitivité externe et de politique économique. Les choses sont d’autant plus graves que les importations de ces pays africains sont souvent libellées en euro, alors que leurs exportations leur sont réglées en dollar. La montée de l’euro par rapport au dollar provoque non seulement une surévaluation du franc CFA (c’est-à-dire une perte de compétitivité de ses produits sur les marchés internationaux), mais aussi une perte de ses recettes d’exportations et revenus fiscaux. La situation actuelle rappelle la situation vécue à la fin des années 1980 lorsque la détérioration des termes de l’échange et la surévaluation du franc FCFA avaient entraîné un appauvrissement des États, la baisse des investissements, l’accroissement du chômage, la fuite des capitaux, et une spectaculaire dévaluation dont les conséquences sociales restent

incrustées dans l’imaginaire collectif.

Un anachronisme

La zone franc constitue assurément un anachronisme économique et monétaire. Ses partisans justifient son existence au travers d’une série d’arguments politiques et économiques. D’abord, ils affirment qu’elle sert de socle à une future union politique africaine. Si c’était le cas, cette union imposée de facto depuis bientôt soixante-dix ans aurait déjà donné quelques résultats tangibles. Or les mauvais traitements réservés récemment encore à des milliers de citoyens burkinabè en Côte-d’Ivoire ou à des Camerounais au Gabon et en Guinée équatoriale prouvent bien que le rêve d’unité africaine entre des populations affamées demeure un lointain mirage, ceci malgré les slogans sur la liberté de circulation des personnes et des biens.

La zone franc est présentée ensuite comme une sympathique copie de l’Union européenne, une espèce de voie obligée dans un monde où les États-Nations disparaissent au profit de grands ensembles. Ceux qui soutiennent cette thèse oublient que la logique des grands regroupements est dictée en priorité par des considérations économiques, et non idéologiques : c’est à force de faire du commerce entre eux que les pays européens ont créé un grand marché communautaire, et justifié ainsi l’abandon de leurs monnaies nationales pour l’adoption d’une monnaie unique.

Les échanges intra-européens représentaient environ 60 % du commerce extérieur français ou allemand lorsque l’euro a été adopté. En Afrique francophone, soixante-dix ans après l’adoption d’une monnaie unique, ils continuent de représenter moins de 5 %.

Des dirigeants africains incapables de gérer une monnaie ?

De plus, un pays qui choisit d’abandonner sa souveraineté monétaire pour faire partie d’une union doit bénéficier en contrepartie de la flexibilité de l’emploi, qui est alors le meilleur moyen de s’adapter aux chocs extérieurs. Ses agents économiques peuvent alors se déplacer librement pour aller saisir des opportunités ailleurs dans la zone monétaire. C’est cette flexibilité du marché du travail qui permet à des plombiers polonais de quitter Varsovie pour s’établir à Hambourg ou Paris s’ils y trouvent plus d’opportunités professionnelles. Un plombier sénégalais qui voudrait s’installer à Libreville n’a aucune chance de se voir délivrer un visa. S’il s’y aventure clandestinement, il y sera en permanence guetté par la violente opposition et la jalousie des travailleurs gabonais aigris et au chômage qui, dans cet État de non-droit, ne s’embarrasseront pas de fioritures pour incendier ses biens, voire attenter à sa vie !

Autre argument souvent invoqué pour justifier l’existence de la zone franc: les dirigeants africains sont trop irresponsables pour qu’on leur confie la gestion d’une monnaie. Ils seraient tous tentés de faire fonctionner la planche à billets comme Mobutu Sese Seko et Robert Mugabe l’ont fait au Zaïre et au Zimbabwe. D’ailleurs, affirme-t-on, la zone franc a permis aux pays d’Afrique noire francophone de maîtriser l’inflation et de maintenir la convertibilité de leur monnaie. Vrai. Mais selon la même logique, ces pays n’auraient jamais dû accepter l’indépendance politique, puisque de nombreux leaders africains se sont montrés bien pires que les colons d’hier.

De plus, les cas extrêmes de l’ex-Zaïre et du Zimbabwe (qui n’ont jamais été membres de la zone franc) ne doivent pas dissimuler les très nombreux exemples de grands succès d’anciens membres du club qui ont bien géré leurs monnaies et en ont même fait l’instrument principal de leur industrialisation et de leur développement (Maroc, Tunisie, Vietnam).

La zone franc, un marché captif pour quelques hommes d’affaires français

Quant au mythe de la convertibilité du franc CFA, il suffit d’essayer d’effectuer un virement bancaire de Brazzaville à Bangui ou de Bamako à N’Djamena pour mesurer la pauvreté de ce slogan : les tracasseries administratives, l’ampleur des formalités et des documents à fournir, la lourdeur des procédures, le coût des transactions, le nombre d’intermédiaires qui doivent chacun être rémunérés, le volume des taxes et commissions et les délais de l’opération sont tels que cette convertibilité ressemble à un leurre. Elle est d’ailleurs “garantie” par la Banque de France, qui exige en contrepartie de tous les pays de la zone franc l’ouverture d’un compte d’opérations auprès du Trésor français, et d’y déposer au moins 65 % de leurs recettes d’exportations. Tiens donc !

En vérité, les avantages tant vantés de la zone franc consistent surtout à offrir un marché captif à quelques hommes d’affaires français installés en Afrique, et à faciliter les transactions de ces élites africaines corrompues qui se rendent régulièrement à Paris pour y approvisionner leurs comptes bancaires, s’offrir des costumes de grands couturiers ou y faire leurs courses de ménage sans avoir à se soucier du taux de change. Quant aux vrais entrepreneurs français et africains qui désirent s’établir durablement sur le continent et y développer des industries dignes de ce nom, ils se préoccupent plutôt de la détérioration de la compétitivité de ces économies, qui est un problème structurel lorsque la monnaie d’économies aussi faibles est liée à un taux de change fixe à une monnaie aussi forte que l’euro. Ce qui intéresse ces vrais créateurs d’emplois, ce n’est pas tant le niveau modéré de l’inflation dont parlent tant les défenseurs de la zone franc, mais les opportunités d’affaires.

Malheureusement, il semble bien que la politique monétaire suivie par les pays d’Afrique noire francophone relève actuellement du masochisme. Quel dommage, quand on sait qu’ils pourraient tirer des enseignements précieux des expériences remarquables d’anciens membres de la zone franc comme la Tunisie ou le Vietnam.
Source : Billets d’Afrique et d’ailleurs – N° 173, Octobre 2008

*Célestin Monga est économiste camerounais et auteur notamment de Sortir du piège monétaire (Economica) cosigné avec J.-C. Tchatchouang et L’argent des autres (LGDJ-Montchretien). Son dernier ouvrage, Un Bantou à Washington, est paru en 2007 aux Presses Universitaires de France.

1 Cet article est repris de l’étude intitulée “1 FCFA = 0,00154 euro ? Macro-économie du masochisme”, paru dans l’ouvrage L’avenir de la zone franc : perspectives africaines, dirigé par Hakim Ben Hammouda et Moustapha Kassé, Paris, Karthala, 2001.

Les pays de la zone franc

Les quatorze pays qui constituent la zone franc sont : Le Bénin, Le Burkina-Faso, Le Cameroun, Le Congo-B, La Côte-d’Ivoire, Le Gabon, La Guinée-Bissau, La Guinée équatoriale, Le Mali, Le Niger, La République centrafricaine, Le Sénégal, Le Tchad, LeTogo

http://lanouvelleexpression.info

dimanche 19 octobre 2008

Cameroun: Concours de l’ENAM - Un faux DAG extorque 12 millions à des candidats


Une enquête est actuellement en cours pour démasquer les arnaqueurs.

Armand Ondoa, directeur de publication du journal « Le régional » se trouve actuellement à la Direction de la police judicaire pour des besoins d’enquête. Selon des indiscrétions, les éléments de la DPJ entendent l’exploiter pour mettre hors d’état de nuire un réseau d’escroquerie autour du concours d’entrée à l’Ecole nationale d’administration et de magistrature (ENAM). Tout serait parti d’une lettre confidentielle rédigée par Armand Ondoa et adressée au directeur des affaires générales (DAG) de l’établissement, Tsele Nomo. Dans ce courrier, le DP fait état de nombreuses plaintes de candidats malheureux au concours d’entrée, dont les résultats ont été publiés il y a quelques semaines. « Il disait dans la lettre que ceux à qui le DAG a pris de l’argent pour avoir le concours s’impatientaient et réclamaient leurs biens puisqu’ils n’ont pas vu leurs noms sur la liste finale », explique-t-on à l’ENAM. Le DAG est ainsi accusé d’avoir extorqué près de 12 millions de francs à des candidats. « D’après la lettre, les candidats auraient dit qu’ils essayent d’entrer en contact avec le DAG mais celui-ci les menace, se vantant d’avoir des relations avec le directeur de la PJ », ajoute notre source.

Des accusations dans lesquelles le mis en cause ne se reconnaît pas. Il décide donc de donner rendez-vous à l’auteur du courrier pour plus d’explications. Mais avant, il prendra la peine d’avertir les forces de l’ordre. « Durant la rencontre, le DAG lui a demandé les noms des personnes à qui il aurait soutiré de l’argent pour une confrontation. Mais le DP a refusé de le faire», affirme un responsable de l’ENAM. Face à ce qui s’apparente à une tentative de chantage, les policiers vont arrêter Armand Ondoa. Ils espèrent ainsi découvrir qui est derrière cette arnaque en se faisant passer pour Tsele Nomo.

Cette affaire intervient après de nombreuses autres, qui ont émaillé le concours d’entrée à l’ENAM cette année. En mai dernier, un escroc était face à la justice pour avoir pris 14 millions de francs à une famille, afin d’aider trois enfants à accéder à l’ENAM, à raison de 4,5 millions de francs par personne. Le directeur général de l’ENAM, Benoît Ndong Soumhet, avait d’ailleurs dû publier un communiqué pour inviter à la prudence et à la vigilance, les populations qui sont souvent leurrées par des arnaqueurs. Surtout en ce qui concerne l’un des concours les plus courus au Cameroun. Mais il faut croire que ça n’a pas été suffisant.

Josiane R. MATIA

Cameroun tribune

Thomas Deltombe : Cameroun, il y a cinquante ans, l’assassinat de Ruben Um Nyobè


Le journaliste français revient sur la profanation du “Mpodol” et nous invite à “réveiller son potentiel insurrectionnel”.

Le 13 septembre 1958, il y a cinquante ans, était tué Ruben Um Nyobè. C’est dans une forêt de Sanaga Maritime, dans le sud du Cameroun, qu’une patrouille française qui traquait depuis des mois le secrétaire général de l’Union des populations du Cameroun (UPC) repérera son objectif. Et l’abattit comme un animal sauvage.
Son corps fut traîné jusqu’au chef-lieu de la région, où il fut exhibé, défiguré, profané. « Le Dieu qui s’était trompé » est mort, annoncera triomphalement un tract tiré à des milliers d’exemplaires. Le corps de Ruben Um Nyobè fut coulé dans un bloc de béton (1.
Cinquante ans après son assassinat, le nom de Ruben Um Nyobè est presque oublié en France. Au Cameroun, en revanche, il reste l’objet d’une immense admiration. Mais cette admiration populaire est restée longtemps contrariée, toute référence à Um Nyobè et à son parti, l’UPC, ayant été interdite par la dictature d’Ahmadou Ahidjo mise en place en 1960 avec le soutien de l’ancienne métropole. La moindre évocation de Um Nyobè était considérée par le pouvoir en place comme « subversive » et sévèrement réprimée. Sa mémoire ne put être perpétuée que dans la clandestinité ou dans l’exil.
D’une certaine manière, le pouvoir camerounais, et ses parrains français, avaient raison de se méfier du souvenir de celui qui était appelé Mpodol (« celui qui porte la parole des siens », selon la traduction du grand spécialiste de cette phase de la décolonisation camerounaise, Achille Mbembe). Car, comme l’écrivait en 1975 une militante française qui fut une de ces correspondantes régulières à Paris dans les années 1950, « ce leader révolutionnaire avait des qualités humaines hors série, celle que l’on retrouve chez les saints, chez un Gandhi par exemple. L’exemplarité de sa vie, la pureté de ses intentions, le rayonnement de sa personnalité pourraient suffire à perpétuer sa mémoire » (2). Ruben Um Nyobè était en somme la figure inversée de ceux qui, après sa mort, prirent le pouvoir au Cameroun.
Um Nyobè est né en 1913 près de Boumnyebel (Sanaga Maritime). Le Cameroun est alors une colonie allemande, qui ne deviendra un territoire sous mandat de la Société des nations (SDN) confié en partage à la France et au Royaume-Uni qu’au sortir de la première guerre mondiale. Eduqué dans les milieux protestants, il devient fonctionnaire et s’intéresse assez tôt à la politique. Il s’engage à la fin des années 1930 dans la Jeunesse camerounaise française (JEUCAFRA), une organisation mise sur pied par l’administration française pour fédérer les élites contre la propagande nazie, avant de prendre part, à la fin de la seconde guerre mondiale, au Cercle d’études marxistes – lancé à Yaoundé par le syndicaliste français Gaston Donnat – qui allait devenir une véritable pépinière du nationalisme camerounais (3). D’abord responsable syndical, Um Nyobè est ensuite désigné secrétaire général de l’Union des populations du Cameroun constituée à Douala en avril 1948. L’heure n’est plus, dira-t-il plus tard, simplement de « s’opposer à l’hitlérisme comme en 1939, mais au colonialisme tout court » (4).
C’est pour défendre cet objectif, articulant intimement progrès social et économique, indépendance pleine et entière, et réunification des Cameroun britannique et français, qu’Um Nyobè engage toutes ses forces en tant que secrétaire général de l’UPC. Inlassablement, pendant les dix dernières années de sa vie, de 1948 à 1958, il réaffirme ces trois principes sur toutes les tribunes et dans tous les journaux. Petit homme modeste, ascétique et d’une étonnante rigueur intellectuelle et morale, il dénonce infatigablement le sort misérable réservé aux « indigènes », les manœuvres des milieux colonialistes, ainsi que la bassesse et la corruption de ceux de ses compatriotes qui préfèrent faire le jeu de l’adversaire plutôt que de s’engager dans la lutte pour la souveraineté nationale et la justice sociale.
Plus exceptionnelle encore est sa capacité à décrypter et à disséquer le système juridique particulier auquel est soumis le Cameroun, devenu territoire sous tutelle de l’Organisation des Nations unies au lendemain du second conflit mondial. Des villages camerounais les plus reculés jusqu’à la tribune des Nations unies, où il est convié à trois reprises entre 1952 et 1954, il explique sans relâche que le droit, aussi bien français qu’international, est dans le camp de l’UPC. La France n’a dès lors aucune légitimité pour s’imposer plus longtemps à une nation qui veut être enfin maîtresse de son destin.
Ce qui frappe quand on lit les textes et les discours du leader de l’UPC, et ce qui les rend aujourd’hui un peu moins attractifs que ceux d’autres grandes figures de l’époque, c’est l’absence de formules abstraites et de lyrisme vague. Pragmatique, Um Nyobè reste toujours au plus près des préoccupations concrètes de son auditoire, enchaînant minutieusement les faits, les chiffres, les dates ou les articles de loi (5).
Utilisant la Raison comme une arme de combat contre ceux-là même qui ont toujours cru en être les dépositaires exclusifs, Ruben Um Nyobè bouleverse l’ordre colonial non seulement dans ce qu’il a de plus odieusement visible mais jusque dans l’imaginaire des colonisés eux-mêmes (6). L’influence d’Um Nyobè dépasse rapidement le strict cadre camerounais : fervent partisan de la coordination des mouvements anti-colonialistes, il devient au cours des années 1950 une des icônes internationales du tiers-mondisme naissant. C’est sans doute la force de cette entreprise de subversion globale qui déterminera l’administration française, à court d’arguments, à recourir à la force brute pour faire taire celui qui apparaît comme le leader le plus charismatique du nationalisme camerounais.
Si Um Nyobè et ses camarades avaient déjà eu à subir à de nombreuses reprises la brutalité et l’arbitraire colonial, le tournant décisif a lieu en 1955 avec l’arrivée au Cameroun d’un nouveau Haut-Commissaire, Roland Pré, qui a pour mission, dès son arrivée au territoire, d’éradiquer l’UPC par tous les moyens. A la suite des provocations répétées de l’administration, le Cameroun est secoué par des semaines d’émeutes sanglantes en mai 1955. Comme l’avait prédit avec une stupéfiante prescience Um Nyobè quelques années plus tôt, l’agitation sociale et politique sert aussitôt de prétexte au gouvernement français pour faire interdire l’UPC. Le 13 juillet 1955, l’UPC et ses organisations annexes sont déclarées illégales. Poussée à la clandestinité, l’Union des populations du Cameroun se disperse. Ruben Um Nyobè se réfugie dans sa région natale, tandis que les autres responsables – parmi lesquels Félix Moumié, Abel Kingue et Ernest Ouandié – fuient au Cameroun sous administration britannique.
La clandestinité forcée constitue une rude épreuve pour Um Nyobè, la précarité du maquis ne pouvant que réduire la portée de son verbe et affaiblir la puissance de ses arguments. Il parvient néanmoins à restructurer l’UPC et à maintenir, contre vents et marées, l’unité de sa direction. Son objectif restera toujours de permettre la réintégration du parti dans le jeu légal qu’il savait être, étant donné le rapport de force, le seul espace susceptible de permettre à terme l’émancipation de son pays. La voie est pourtant étroite : tandis que l’administration tente en vain d’ultimes manœuvres pour rallier Um Nyobè à la cause française, les upécistes exilés au Cameroun britannique penchent de plus en plus pour une stratégie de lutte armée inspirée des modèles indochinois ou algérien. Acculé, Ruben Um Nyobè – qui avait toujours soutenu que la lutte armée au Cameroun était « dépassée » puisque la force du droit devait, selon lui, suffire à faire triompher la cause nationale – accepte finalement, mais sans conviction, la création d’une structure armée fin 1956. Mais la situation devient rapidement désespérée pour les nationalistes camerounais : face à une « rébellion » sans armes, l’armée française s’engage, sous l’impulsion du nouveau Haut-commissaire Pierre Messmer, dans une répression brutale dont Um Nyobè sera, le 13 septembre 1958, une victime essentielle.
Quelques jours seulement après la mort de Mpodol et alors que la Constitution de Ve République vient d’être adoptée, la France annonce aux Camerounais, maintenant que « l’hypothèque Um Nyobè » est levée, qu’elle accordera l’indépendance à leur pays le 1er janvier 1960. La métropole confiera cette « indépendance » à ceux qui l’avaient le moins demandé – lesquels combattront pendant des années, avec acharnement, et toujours avec l’aide de la France, tous ceux qui resteront fidèles, les armes à la main ou par d’autres moyens, au message d’Um Nyobè. Un message qui reste d’ailleurs d’une brulante actualité dans un pays bâillonné par un pouvoir corrompu et une pauvreté entretenue où les émeutes sociales et politiques sont, encore aujourd’hui, systématiquement réprimées. Un pays qui devra, pour reprendre les termes d’Achille Mbembe après la répression des émeutes de février 2008 (7), savoir « réveiller le potentiel insurrectionnel » que Ruben Um Nyobè en son temps avait su allumer (8).

Texte publié dans Le Monde diplomatique
Bibliographie

(1) Achille Mbembe, La naissance du maquis au Sud Cameroun, 1920-1960 : histoire des usages de la raison en colonie, Karthala, Paris, 1996.
(2) Claude Gérard, Les pionniers de l’indépendance, Editions Inter-Continents, 1975, p 126.
(3) Gaston Donnat, Afin que nul n’oublie. Itinéraire d’un anti-colonialiste. Algérie, Cameroun, Afrique, L’Harmattan, Paris, 2000.
(4) Richard Joseph, Le mouvement nationaliste au Cameroun : les origines sociales de l’UPC, Karthala, Paris, 1986, p 108.
(5) Voir les textes rassemblés par Achille Mbembe : Le problème national camerounais (L’Harmattan, 1984) et Écrits sous maquis (L’Harmattan, 1989).
(6) Voir Achille Mbembe, op. cit.
(7) Voir Matthieu Tébuché, « Triste bilan au Cameroun », 4 mars 2008.
(8) Achille Mbembe : « L’Upc représente le potentiel insurrectionnel de la lutte qu’il faut réactiver », Le Messager, Douala, 16 avril 2008.

http://www.lejourquotidien.info/index.php?option=com_content&task=view&id=573&Itemid=61

mercredi 15 octobre 2008

Cameroun - Chemin de fer : un deuxième avenant pour quoi faire ?

Un débat en catimini
Le second avenant en discussion concerne les investissements sur le chemin de fer entre 2009 et 2020.

Depuis quelque temps, des débats ont cours au sein de l’entreprise Camrail et de certaines administrations camerounaises sur la possibilité d’un avenant n°2 à la convention ferroviaire, près de dix ans après la privatisation du chemin de fer au Cameroun.
Dans le cadre de cet avenant, l’Etat du Cameroun s’engage à financer, avec Camrail, les projets d’investissements majeurs du chemin de fer entre 2009 et 2020. Dans cet accord, il est prévu que l’Etat du Cameroun débourse un peu plus de 110 milliards de Fcfa, contre près de 130 milliards de Fcfa pour Camrail.
Au moment où les discussions ont cours, en catimini, pour l’entrée en application de ce projet d’avenant, des questions se posent sur les conditions dans lesquelles celui-ci va se faire. On remarque en effet que Camrail, entreprise privée, bénéficie de privilèges autrement plus importants que ceux de la défunte société parapublique. Comme l’indique une source, «il s’agira en réalité, d’un financement du riche par les pauvres».
En effet, la société Camrail, dans la prochaine configuration, ne prend pratiquement aucun risque. Ses risques et charges sont minimisés, car transférés à l’Etat, qui opère comme son assureur et financier. «Les dégradations majeures de la voie seront prises en charge par l’Etat, en plus, sous le contrôle de Camrail», indique une source.
L’avenant n°2 prévoit notamment que les voies ferrées seront renouvelées avec des traverses métalliques. Ce qui semble arranger le concessionnaire (Camrail) au détriment de l’Etat du Cameroun. Car, le choix des traverses métalliques est au moins plus coûteux que celui des traverses bi blocs, utilisées actuellement. Un spécialiste indique : «Il est important de noter que la technologie des traverses bi blocs est aujourd’hui avérée. Elles sont techniquement bonnes, très stables, très durables (autant sinon plus que les traverses métalliques) ; moins coûteuses (même si l’on intègre le coût de pose), et elles sont dorénavant réparables. Par dessus tout, elles ont l’avantage qu’elles pourraient être faites sur place, et ainsi offriront des emplois aux Camerounais, en plus d’intégrer dans leur fabrication une bonne part d’intrants de l’économie nationale, notamment le ciment, le concassé, … tout en réduisant d’autant les matériaux importés comme le fer qui a connu une inflation importante ces dernières années, et de ce fait participe à l’évasion de l’argent gagné ici».
Mais, la principale question qu’on peut se poser est celle de savoir pourquoi un avenant n°2 à la convention ferroviaire, alors que le bilan des premières années de la concession faite à Camrail n’a jamais été fait. La question se pose d’autant plus que d’emblée, on ne voit pas le gain que le Cameroun tire de cette convention. Certains spécialistes approchés et au courant des tractations qui se déroulent en ce moment pensent même que ce qui se profile l’horizon, au cas où le projet d’avenant n°2 est adopté, n’est rien d’autre qu’une «subvention massive d’un privé par l’Etat». Or, à l’époque, les privatisations ont été justifiées par la nécessité de mettre fin aux subventions accordées par l’Etat aux sociétés parapubliques comme la Regifercam.


Et Bolloré prit le contrôle

Aujourd’hui, c’est le groupe Bolloré qui contrôle le chemin de fer au Cameroun. Ça n’a pas toujours été le cas, même avec la convention de concession signée en janvier 1999.

La Régie des Chemins de Fer (Regifercam) était inscrite sur la liste des entreprises étatiques à privatiser, fut mise en concession par le gouvernement camerounais, car les activités de transport ferroviaire représentaient pour les budgets de l’Etat une lourde charge.
La privatisation envisagée avait donc pour but de donner aux chemins de fer les moyens de jouer un rôle important dans l’économie nationale. Sur la base de la politique de restructuration de l’économie camerounaise, les activités de transport ferroviaire furent concédées à la société Camrail.
Engagé en réalité en janvier 1996, le processus a abouti à la signature le 19 janvier 1996, d’une « convention de concession de l’activité des chemins de fer au Cameroun ». La reprise officielle de cette activité par Camrail a eu lieu le 1er avril 1999.
Les signataires de cette convention étaient, d’une part, l’Etat du Cameroun et d’autre part le groupe Bolloré, avec comme opérateur le groupe Comazar, sous la désignation Camrail. Comment se fait-il donc que le groupe Bolloré se retrouve tout seul aujourd’hui à mener la barque ?
En effet, Bolloré (via sa filiale Saga), dans le cadre d'un consortium avec un groupement belgo-sud africain (Comazar) a obtenu la concession du service public du chemin de fer Regifercam devenu Camrail. A la suite de la convention de 1999, un certain M. Kelbé a été nommé président du conseil d’administration. En réalité, celui-ci n’a jamais véritablement siégé comme tel. Ce rôle étant dévolu, dès le départ, à M. Giros du groupe Bolloré. A côté, l’opérateur Comazar n’est pas resté bien longtemps non plus. Il a en effet été absorbé par le groupe Bolloré.


Une convention vieille de près de dix ans


Écrit par Jules Romuald Nkonlak
C’est par un décret de deux articles, signé le 19 mars 1999 par le président de la République que la convention de concession de l’activité ferroviaire au Cameroun au profit de la Société Camrail a été approuvée. Le premier article, qui comporte en fait l’essentiel de l’information, indique : «Est approuvée la Convention de concession de l’activité ferroviaire au signée le 19 janvier 1999 entre la République du Cameroun et la Société Camrail».

La concession était prévue à l’époque pour 30 ans, avec comme principaux objectifs de développer le transport des personnes et des marchandises, de renforcer la sécurité, d’équiper les gares de voyageurs.
A l’époque de sa reprise du chemin de fer camerounais, Camrail devait réhabiliter le matériel roulant et renouveler la voie. Le parc du matériel roulant se composait à ce moment là de 32 locomotives de ligne, de locomotives de manœuvre, de voitures voyageurs et de wagons marchandises.
Il n’était pas prévu à cette époque le second avenant qui est actuellement discuté. De même, la convention de concession mettait l’accent également sur le transport des passagers, don on a l’impression aujourd’hui qu’il a été un peu mis de côté.


Les intérêts des populations bafouées


Écrit par Maurice Simo Djom
La fonction sociale et humaine de l’exploitation du chemin de fer est sacrifiée.

La privatisation de la Régie nationale des chemins de fer du Cameroun (Regifercam) décidée par Décret n°99/057 du 19 mars1999 a entraîné une série de réformes dans le secteur du transport ferroviaire.
La réduction de moitié des fréquences du transport des passagers en est une. Avec l’arrivée de la Camrail, la deuxième ligne Yaoundé-Ngaoundéré a été supprimée. Avec la Regifercam, les voyageurs qui empruntaient le Transcamerounais avaient la possibilité de voyager deux fois par jour. Le deuxième train, dénommé La navette, avait une vocation sociale : il s’arrêtait à toutes les gares et à toute occasion, contrairement à la couchette qui ne stationne que dans de grandes gares. Résultat des courses : les gares de petite envergure ne sont plus desservies. Les activités commerciales qui s’y développaient se sont arrêtées. Des zones entières, qui n’ont pour toute ouverture sur le réseau des infrastructures de communication que le chemin de fer, se retrouvent ainsi coupées du reste du territoire. Les lignes Yaoundé-Mbalmayo et Yaoundé-Belabo ont aussi été supprimées.
Les infrastructures ferroviaires, à l’instar des installations fixes (rails, gares de fret, gares voyageurs, gares de triage..), le parc des engins et des véhicules, n’ont pas été renouvelées. Des déraillements continuent d’avoir lieu, à cause de la vétusté des rails.
La tarification de la prestation a été également revue à la hausse. Le billet du voyage aller Yaoundé-Ngaoundéré en 2ème assise coûtait 7.000 Fcfa, il est progressivement passé à 10.000 Fcfa. En 1ère assise, il était de 12.000Fcfa, il est passé à 17.000Fcfa. Les billets en wagon-lit valent 25.000 Fcfa et 28.000 Fcfa selon que l’on occupe un seul lit pour si l’on occupe un lit pour deux, alors qu’ils étaient naguère de 16500 Fcfa et de 18000 Fcfa.
Dans la même logique, les coûts de transport des colis ont subi une forte augmentation. L’on remarque en outre qu’aucun investissement n’a été fait dans les zones traversées par le chemin de fer. Les voyageurs se plaignent aussi des conditions peu humaines de voyage par train où l’hygiène est approximative. La concession d’exploitation de l’activité ferroviaire camerounaise a été cédée par l’Etat à la Camrail pour 30 ans le 19 janvier 1999. Camrail a effectivement repris cette activité le 1er avril 1999.

http://www.lejourquotidien.info/index.php?option=com_content&task=view&id=489&Itemid=56

Afrique - Anicet Ekane : Sankara, le joueur de tam-tam


Le président du Manidem analyse l'héritage du défunt leader de la révolution burkinabè.

Il n'y a rien d'absolu dans la vie, même pas la mort. Sinon, nous ne vibrerions pas à l'évocation du nom de Sankara.
Ils ont, sans aucun doute, éliminé physiquement Sankara. Ils ont procédé par la même méthode, qu'ils utilisent depuis la colonisation.
Tout d'abord, il faut repérer les têtes qui débordent, c'est-à-dire, celles des récalcitrants, celles qui ne veulent pas rentrer dans les rangs, celles qui pensent qu'il est temps, qu'il est grand temps que l'Afrique soit libre.
Ensuite il faut faire couper ces têtes là par les autres, les sages, les dociles, ceux avec lesquels, disent-ils, " On peut discuter " : Ahidjo, Houphouët-Boigny, Mobutu, Compaoré, etc.

Et enfin, il faut abrutir, il faut saouler les Africains avec la musique du néocolonialisme, du néolibéralisme, la bonne musique, bien sur, celle qui prône :
- La ré-colonisation économique de notre continent par les capitalistes occidentaux et par le bien de la magie de la privatisation de nos économies, avec en prime l'ouverture des marchés et frontières, la libre circulation des capitaux et la déréglementation. Tout cela pour des économies qu'ils auront au préalable fragilisées ;
- La spécialisation économique de l'Afrique à qui ils assignent le rôle de pourvoyeur de matières premières et main d'œuvre bon marché ;
- La mise en place du carcan néolibéral Fmi - Banque Mondiale, qui, aujourd'hui, ne trouve guère plus de fervents supporters, tant les dégâts qu'il a occasionnés sont abominables.

Par contre, Sankara jouait une tout autre musique. Celle de l'autodétermination des Africains. Cette musique là, qui donnait le change à celle des maîtres de l'occident et des élites bourgeoises au caractère rançonneur, corrompu et anti patriotique avéré, cette musique devait absolument être arrêtée.
Alors ils ont décidé de supprimer le joueur du tam-tam, Thomas Sankara.
La messe était dite ! Ont-ils pensé.
C'était oublier que la mélodie de cette musique là, celle du joueur de tam-tam Sankara, allait continuer à trottiner dans la tête des Africains. Et comme il fallait s'y attendre, et au grand dam des bourreaux, d'autres joueurs de tam-tam comme Sankara, et avant lui, comme Um, Lumumba, Moumié, Ouandié, etc., allaient naître de l'Afrique profonde.

Et nous sommes là. Nous sommes bien là, camarade Sankara. Les nouveaux joueurs de tam-tam, décidés à jouer la même musique que la tienne. Une musique améliorée. Persuadés, bien sur, que ta musique, notre musique, va encore gagner du terrain.
Et comme par enchantement, leur Tam-tam, celui du capitalisme triomphant et assurant le bonheur de l'Humanité, ce tam-tam là vient d'être troué par la crise financière mondiale.

Les Sawa disent : " O pudi ngando. O ma kusa ngando.Loko le nde botea " c'est-à-dire : tu as voulu danser. Tu vas danser. Le bal ne fait que commencer. Sankara, ton idée de l'Afrique, d'une autre Afrique maître de son destin, avance résolument.
Et comme disait Victor Hugo : " Aucune armée n'est aussi puissante qu'une idée dont l'heure est venue. "

http://www.quotidienmutations.info/mutations/oct08/1224081048.php

mardi 14 octobre 2008

REGARDEZ - Quand John McCain veut "fouetter" Barack Obama

Le candidat républicain à la présidentielle John McCain a appelé dimanche devant ses partisans au quartier général de sa campagne à Arlington en Virginie, près de Washington, à une "campagne respectueuse", tout en voulant ... "fouetter" Barack Obama. Fouetter? "Fouetter son 'vous savez-quoi'", précise McCain qui affirme vouloir s'exécuter lors du prochain débat télévisé, mercredi prochain.

Regardez l'extrait, diffusé en exclusivité par Associated Press , sous-titré par lepoint.fr :



Ce commentaire vraisemblablement improvisé par John McCain devant ses supporteurs pourrait lui attirer de nombreuses critiques car le fouet reste aux Etats-Unis un instrument de sinistre mémoire lié à l'histoire de l'esclavage. Il intervient au moment où la question raciale , longtemps tabou, a fait irruption dans la campagne avec les déclarations d'un parlementaire démocrate John Lewis, figure de la lutte pour les droits civiques dans les années 1960, qui a accusé ce week-end John McCain d'inciter à la haine contre Barack Obama.

http://www.lepoint.fr